Le Dernier homme de Fukushima, d'Antonio Pagnotta, Don Quichotte
Naoto Matsumura est le seul habitant de la région de Fukushima à résister au gouvernement et à la tentaculaire industrie nucléaire japonaise en retournant vivre là où il est né et a toujours vécu.
Vivre chez lui, dans sa maison irradiée, buvant et mangeant des aliments contaminés, respirant un air vicié. Pourquoi?
Pour ne pas abandonner ces lieux, pour mettre l'Etat devant ses responsabilités. Au départ, cette volonté farouche a surtout été celle de s'occuper des animaux abandonnés sur place: animaux domestiques mais aussi d'élevage. La description des étables contenant les restes du bétail coincé dans les enclos est poignante... Au fond, Naoto est un homme simple qui ne cherchait pas à entrer en guerre mais qui y a été obligé, en quelque sorte.
L'auteur est un journaliste spécialiste du Japon, a rencontré Naoto Matsumura à plusieurs reprises (clandestinement, il est interdit d'entrer dans cette zone sans autorisation) et nous éclaire sur la culture et la façon de vivre des Japonais. C'est une société encore aujourd'hui empreinte du shintô, une religion qui accorde une place importante à la nature, qui met sur un pied d'égalité les hommes et les animaux (on retrouve cet esprit dans beaucoup d'oeuvres comme celles de Miyazaki par exemple). C'est pourquoi il était naturel pour Naoto Matsumara de venir au secours des animaux abandonnés: vaches, chiens, chats, et même autruches...
C'est aussi une passionnante charge contre le gouvernement et le lobby du nucléaire mais aussi contre une mentalité japonaise propre à l'après-guerre, quand toute la société s'est tournée vers la production, le sacrifice pour le pays au nom du progrès et pour se sortir de l'hégémonie américaine. Ce "bond en avant" s'est accompagné d'une absence de sens critique, d'un aveuglement, d'une obéissance sans failles enseignés dans toutes les écoles, à tous les niveaux.
Selon lui, cet état d'esprit à conduit le pays à cette catastrophe humaine et environnementale qui donne le vertige.
Son engagement commence à faire boule de neige, une véritable communauté le soutient et lui envoie des dons, des colis (des aliments en conserve). C'est peu de choses en regard de sa situation... mais ça lui donne un peu d'espoir. Ce livre se lit avec la peur au ventre il est vrai, tant cette pollution invisible est cauchemardesque, heureusement l'auteur n'est pas là pour faire du sensationnalisme mais pour rendre compte de la vie d'un homme et donner son point de vue de journaliste sur cette situation.
http://www.ledernierhommedefukushimaafessenheim.com
http://www.mediapart.fr/portfolios/fukushima-17-le-dernier-homme
https://www.facebook.com/pages/Naoto-Matsumura-Guardian-of-Fukushimas-Animals/182452015189991